Le Montishow n'est pas une délirante parodie !

22 H 15, j'attendais dans un quartier malfamé de Oтек Город. L'une des 400 Monovilles peuplant la Russie. Cette cité tout droit sortie des enfers a été construite autour d'un complexe minier. Comme toute bonne Monoville, son moteur économique était mono-industriel.

Oтек Город, la ville spécialement bâtie autour d'une usine exploitant du charbon, "la Gaziok Industry". Celle-ci était la seule source de revenus légale de la population. Elle employait 15 000 personnes pour 30 000 habitants.


Une grande usine froide et métallique, une ville érigée au milieu d'une immense forêt, un travail minier harassant, un climat glacé. Les conditions de vie n'étaient pas idylliques. Aujourd'hui, c'est pire. 

La crise économique a frappé le pays. L'entreprise a disparue, emporté par la faillite du système communiste. Laissant sur le carreau des milliers de gens. L'autarcie et le crime sont devenus le quotidien de Oтек Город. Les gens tentent de survivent par tous les moyens. Ils seraient prêts à t'égorger comme un lapin pour une misérable pièce de 10 cents. Oтек Город représente le déclin Russe dans toute sa splendeur. 

Je me trouvais dans l'un des quartiers chauds entre les prostituées et les vendeurs de champignons miniers. J'écrasais ma cigarette et regardais la montre achetée lors de mon dernier séjour en Chine. Une fausse Ice Watch verte à 5 euros. Aussi authentique que le modèle officielle en bien moins onéreux. 

Il devrait bientôt arriver. J'avais été intrigué par les textes du Montishow. Pour moi, il faisait partie de ces dingues de geeks en manque de reconnaissance qui essaient de se donner un style sur Internet. J'avais d'abord cru à un canular en le lisant. J'avais jeté un œil sur sa Fan Page. J'y ai vu un tas de gens, plus fous les uns que les autres. Pour moi c'était une vaste blague ce type.

Cependant, plus le temps passait plus j'avais de doutes. Ses textes atypiques me touchaient. Ce type possède une haine incroyable couplé à un humour décalé. Mentalement malade, je dirais. D'ailleurs, je pensais qu'ils n'étaient pas seul à écrire tellement il publiait sur son blog. La suite de cette aventure m'a donné tort. Il était bien seul, tout seul.

Mes doigts commençaient à s'engourdir. Le matériel de chez Décathlon ne faisaient pas le poids fasse à la rudesse du climat Russe. J'attendais Vladimir Flitkov et j'avais sacrément froid.


L'avion m'a toujours donné la frousse. De plus, les compagnies Russes n'ont pas très bonne réputation. Je n'avais pas le choix. La voiture était ma seule solution pour débarquer dans cette ville post-industrielle ou plutôt pré-apocalyptique. Rouler 3627 KM en 57 heures dans une voiture d'avant guerre, pour se faire voir poser un lapin me ferait très mal. Je fais partie de ces journalistes qui touchent un salaire précaire. Je n'ai pas de temps ni d'argent à perdre.

Une prostituée russe se dirigea vers moi. Elle criait en me faisant des gestes obscènes. Je ne comprenais pas un piètre de mots mais ses gestes en disaient suffisamment longs. Je lui répondis d'un hochement de tête négatif. Elle me répondit par un doigt d'honneur et fit volte-face.

Au loin, je vis un type jeté une nana d'une bagnole. Il lui gueula dessus tel un putois enragé et lui balança des préservatifs au visage. Musique à fond, la coupé Mercedes se dirigea vers moi à toute vitesse. Il s'approcha pour freiner au dernier moment. Je faillis mourir écrasé ! La fenêtre s'ouvrit, un gars typique Russe m'adressa la parole.

Flitkov : TOI ETRE JOURNALISTE BELGE ?

Journaliste :  Oui.

F : TOI MONTER.

Je montas et l'intérieur cheap de la voiture agressa ma rétine. Sièges en sky roses, volant en moumoute, dés accrochés au rétroviseur, chien kitsh à la tête remuante sur le tableau de bord, pommeau de vitesse argenté... La totale du vrai bon tuning de Kéké.  


Flitkov démarra en trombe, j'eus à peine le temps de m'asseoir. 

F : DESOLE POUR RETARD. MAIS AFFAIRES ETRE AFFAIRES. JE ADORE FRANCE REGARDE MOI ECOUTER TOUJOURS CHANSONS FRANCAIS. MOI PRODUIRE AUSSI. 

Cet homme ne parlait pas. Il criait. Des boules Quiès auraient été les bienvenues pour ne pas devenir sourd avant la fin du voyage. Il s'empara d'un CD et le glissa dans le lecteur. Les baffles commencent à jouer. Je me serais bien passé de cette abomination. Moi qui voulait du dépaysement, au niveau musical c'était raté. MTV fait des ravages dans le monde entier. 




F :  MOI PRODUIRE ÇA ! ÇA RAPPORTER BEAUCOUP ARGENT. ÇA ÊTRE MUSIQUE POUR GAMINES QUI FAIT DEVENIR MOI RICHE.

J : Vous en produisez beaucoup des artistes comme celui-ci. 

J'aurais bien aimé remplacé le mot "artiste" par "des merdes pareilles" mais notre rencontre aurait très mal débuté.

F : OUI BEAUCOUP BEAUCOUP MARCHER. JE FAIRE SONNERIES PORTABLE, FONDS D'ECRAN, T-SHIRT. CA ETRE TRES RENTABLE. 

Un long silence s'installa. J'étais désœuvré face à ces paroles. Un type comme lui était à la base du déclin de la qualité musicale de notre système. J'avais envie de pleurer. Nous quittions la ville pour nous engouffrer dans les bois. J'avais de réels doutes quant à la fiabilité de la voiture. Une panne dans ce bois et s'en était fini de nous.

J : Dites, vous n'avez pas peur que nous restions bloqué ou que nous tombions en panne dans cette forêt ?

F : TOI PEUR ? PAS T'EN FAIRE. MOI DEJA CONDUIRE DES CENTAINES DE FOIS AVEC COFFRE BIEN CHARGER DANS CETTE FORET ET MOI AUCUN PROBLEME.

J : Coffre chargé de provisions pour le Montishow ?

F : PAS VRAIMENT. 

Je ne préférais pas penser au contenu du coffre. Je me concentrais sur la route. Je ne connaissais pas du tout la Russie.

F : ALORS TOI INTERESSE PAR MONTISHOW ? TOI DONNER MOITIE ARGENT POUR INTERVIEW MAINTENANT ET LE RESTE APRES OK ?

J : OK. Je vous les donne une fois arrivé à la cabane. Ce qui m'intéresse ? Bien, je veux avant tout savoir s'il s'agit d'un fake. Si non, je veux voir à quoi ressemble ce type.

F : AHAHAHA...TOI PAS ÊTRE DÉÇU. ÇA ÊTRE SUR ! LUI DÉJÀ ÊTRE BIZARRE MAIS AVEC TOUT CE QUE JE DONNE. C'ÊTRE ENCORE PIRE !

J : Sérieusement, vous pensez tirer de l'argent de ce gars ?

F : OUI. REGARDE JE FAIS AUSSI CETTE MERDE ET JE GAGNE POGNON.

Il changea la plage de CD et une autre de ces infâmes bouse musicale débuta.



Je fus étonné. Oui, il était pleinement conscient qu'il faisait de la merde. Il était moins con que je ne le pensais. Une réelle révélation.

J : D'accord, d'accord. Mais la musique n'a rien avoir avec la littérature ? Puis ce n'est pas un écrivain.

Il haussa les épaules et dit :

F : QUI TENTER RIEN A RIEN !

J : C'est vrai. Un point pour vous. Mais quand même, je reste perplexe.

F : TOI PAS ÊTRE ENTREPRENEUR ET TOI PAS CONNAITRE MISÈRE. MÊME PEUPLE ITALIEN A PAS CRU AU GÉNIE DE LÉONARD DE VINCI. LUI ÊTRE EMBAUCHE PAR FRANÇAIS ! 

Cette réponse m'a littéralement cloué la bouche, je ne sus y répondre. Nous continuions dans le bois enneigé. 20 minutes s'était écoulée depuis notre départ. Ce bois, un vrai désert blanc. La peur me rendait nerveux. J'aurais très mal apprécié qu'il me jette de la voiture et reparte avec l'argent. La musique défilait. Au loin, je voyais la cabane, cette fameuse cabane. Nous arrivions.

F : VOILA NOUS ARRIVER TOI AVOIR 10 MINUTES POUR INTERVIEW PAS PLUS. 10 MINUTES EN TETE A TETE COMME CONVENU. 

J'avais lu la première interview du Montishow. Une vraie mascarade. J'ai donc convenu avec Flitkov qu'il ne devait pas y participer. Cela donnerait plus de sincérité et surtout plus de sécurité pour l'entrevue. Nous descendîmes de la voiture.

F : BONNE CHANCE 

Je ne voyais pas pourquoi, j'aurais eu besoin de chance...Je m'avançais de la cabane. Un véritable taudis. Il y avait de nombreux os, de la peau d'animal, des bouteilles d'alcool et un tas de papiers avec des écritures Russes. 


Je soufflais, mon cœur palpitait. J'attendis environ une minute avant de frapper à la porte. Toc..Toc..Toc...Aucune réponse...Je tentais une seconde fois...Toc...Toc...Toc Une voix grave et puissante apparut. 

Montishow : Bordel si c'est pour les pizzas !? C'est la maison d'à côté connard ! Si c'est pour me vendre des trucs qu'un chimpanzé pourrait utiliser... 

La voix s'est tue d'un coup dans un grand BOOM.

F : CA ARRIVE SOUVENT QUAND LUI S'ÉNERVER TROP LUI TOMBER DE SA CHAISE. PAS GRAVE

J : OK, je vais attendre qu'il se calme alors. 

La porte s'ouvrit d'un coup ! Devant moi, il apparut. Très grand, avec une barbe, les yeux noirs persans, maigre. Il avait l'air assez dingue. Il me regardait de haut en bas et dit.

Montishow : La Gay Pride c'est pas ici. Tu t'es trompé de pays mon pote. Salut ! 

Il ferma la porte brusquement.

J : Montishow, je suis journaliste. Je viens vous interviewer.

M : J'ai déjà donné mec ! 

Là, j'eus une phrases de génie.

J : J'aimerais faire votre promotion. Je travaille pour le Journal "Le Soir". Je m'appelle Henry Bernst.

M : Promotion !? Il fallait le dire avant mon brave.

Il ouvrit la porte et me fit un d'un doigt d'honneur. Puis la referma.

J : Mais ! Je...suis venu exprès de Belgique pour vous.

M : Oh, tu vas me faire pleurer l'enflure du dimanche. Tu viens de Belgique ? T'as des frites sur toi ?

J : Non...heu...je... 

Il rouvrit la porte, me saisit et me tira dans la cabane. Je tombais par terre, une foule d'écureuils se jeta sur moi. Il y en avait plus d'une centaine. L'odeur, cette infâme odeur. Le rat crevé aurait été un doux parfum par rapport à la senteur de cette sordide cabane. Il leva la main avec dextérité. Les écureuils pris de peur s'écartèrent de moi. Je me relevais avec peine. Il s'approcha et me fixa du regard.

M : Alors comme ça tu viens de la Belgique, l'enflure ! Et tu manges pas de frites !? Tu te foutrais pas de ma gueule ?

J : Je...je n'ai pas de frites sur moi. Ça ne veut pas dire que je n'en consomme pas.

M : Mouais. Admettons que je te crois. Qu'est-ce que tu viens m'emmerder ici ? Je peux pas bosser peinard !
J : A vrai dire, je viens par curiosité. Je voulais voir si vous existiez réellement.

M : Tu l'as vu ? Tu peux te barrer maintenant !

J : Non, non, pourriez-vous m'accorder une petite interview. J'ai quelques questions. J'ai amené un bouteille d'Absinthe Cannabis.


Je la lui tendis. D'un geste précis, il s'en empara. Avec le sourire d'un fou. Il déboucha la bouteille et dit :

M : Santé l'enflure ! Je veux bien faire un effort. Allez, pose moi tes questions débiles.

J : Oui, Monsieur Montishow. J'ai lu votre premier interview et je suis vos histoires. Une chose me frappe, bien que vous n'ayez pas un grand niveau d'écriture. Vous arrivez à accaparer l'attention de certaines personnes. Comment expliquez-vous cela.

Il avait déjà vidé la moitié de la bouteille à ce moment. Il tendit son doigt vers la bande d'écureuils et dit :

M : Tu vois petit con ! Ils l'avaient prédit. Ils avaient dit que le putain de singe funky allait arriver pour nous péter la gueule à tous. Vous ne les aviez pas cru hein ! Tu flippes comme une plante en pleine sécheresse maintenant. L'apocalypse, c'est la putain d'apocalypse.....

Il claqua la bouteille par terre et shoota dans le tas d'écureuils. Je n'en croyais pas mes yeux. Les écureuils effrayés tentaient de répliquer en lui sautant dessus. Il attrapa un bâton et joua au baseball avec les rongeurs qui finirent tous au tapis.


J : Heu....qui ça "ils" ?

M : Qui ça "ils" ? Tu te fous de moi ! Mais regarde autour de toi, bon Dieu ! Tu ne vois pas ce ramassis d'ordures grasses habillées en rose jouant les Cowboy à coups de millions de dollars.

J : Mais...nous sommes dans un bois. Il n'y a personne ici.

M : Les gens veulent voir ce qu'ils veulent bien voir. D'autres questions ?

J : Oui, vous rigolez ? Vous et votre Flitkov c'est une blague ? Un fake ?

M : T'es ou là ? T'es avec qui ? Je m'enferme ici avec plaisir. Tout ceci est réel ! Regarde ça.

Il me montra les chats léopards esprit sixteen qu'il offrait à ses lecteurs pour sa candidature présidentielle.

M : Bien que Flitkov soit un gros radin, il investit un minimum dans le merchandising. Ils sont classes ces chats léopards empaillés. T'as vu les belles couleurs. T'aimerais en avoir un ? Ouais ? Pas de chance, seuls les putains de fans peuvent en avoir.

J : Bien...autre question. Quels sont les projets futurs du Montishow ?

M : Écrire sans fautes serait un grand progrès. Sinon...heu....bien...j'ai pas vraiment réfléchi à ça. Je suis le volcan d'idées qui peut se réveiller ou s'éteindre à tout moment. T'entends ce qui se passe ?

J : Oui, mais vous devez bien avoir quelques idées ?

M : Moi, je ne me fais plus d'illusions pour mon futur. Je suis ici. J'écris et je survis comme je peux. Le trottoir s'éloigne peu à peu. Pour le moment c'est le principal.

Les minutes défilaient, il ne me restait plus beaucoup de temps.

J : Pourquoi ce culte envers les chats ? Comme votre logo par exemple.



M : Tu vois, je suis né avec les chats. J'ai pas eu de parents. J'ai été abandonné dans un caniveau. Une meute de chats sauvages m'a recueilli et m'a élevé comme un membre de la famille. Je les remercie. Maintenant, je peux me lécher où je veux. Ça t'en bouche le cul l'enflure !?

Il se léchait devant moi. C'était assez répugnant. Tout à coup, dans un élan de folie, il s'excita. Il sauta compulsivement dans tous les sens.

M : Je suis aussi rutilant que le yéti dans Tintin. Je vous botte le cul à tous bande de petits cons ! Ta grand mère était même pas née quand j'ai soulevé le marteau de Thor...hughhhh...hugghhhh...

Pris de spasmes, il chuta et trembla. Une crise d'épilepsie ou la drogue mêlée à l'alcool ? Les écureuils en profitèrent pour se jeter sur lui. Agglutinés sur le Montishow, les écureuils prirent un malin plaisir à le mordre.

M : Haaaaaaa, tu peux pas m'avoir la bande d'écureuils....haaaaaaaaa.....les écureuils du diable sont à mes trousses......haaaaaaaa...

Il se roulait sur le sol. La scène était absurde. Flitkov entra et cria.

F : SUFFIRE !

Cette fois-ci, les écureuils se jetèrent sur Flitkov.



Surpris, Flitkov fit un pas en arrière et s'écroula. La porte ouverte, les rongeurs en profitaient pour fuir.

M : Ma bouffe.....bordel....ils se font la malle. C'est petits cons se font la mâle. Non.....mon élevage qui fout le camp. C'est de la faute du journaleux tout ça !

Flitkov m'attrapa et me fit sortir. Il bloqua la porte. Le Montishow était toujours à l'intérieur.

M : Haaaaaaaaa....saloperie de journaleux de ***** de ta****** p******* de m******.

F : AHAHAHAHA. COMIQUE MONTISHOW TOUJOURS COMIQUE. ALLEZ JOURNALISTE FILE POGNON OU MOI TE RETAPER DANS LA CABANE.

Je donnais l'argent à Flitkov. Nous montions dans la voiture pour quitter le bois. Une sacrée interview. Mes doutes étaient dissipés.

Le Montishow existe vraiment.

Il ne m'a pas laissé et ne vous laissera pas indemne.



2 commentaires:

  1. aaah bah oui, c'est pour ça que sur youtube ils mettent les paroles dans la description alors..!

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  2. Merci à toi journaliste d'avoir rétabli la vérité.

    Tu peux revenir surtout si t'amènes de la Vodka Cannabis.

    Mais bon...Ne fais pas ton radin. Amène une caisse remplie. Connard de radin de journaliste !

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Attention à toi, les écureuils qui disent des conneries. Je les bouffe comme des chips bien croquants !